A chaud – Return of the Obra Dinn

Ce n’est un secret pour personne, je suis très peu friand de narration interactive. Si le pinacle de ce genre est communément désigné comme la série Walking Dead de Telltale, je ne peux qu’exprimer à son égard un désintérêt respectueux: c’est certes bien écrit contrairement à du Cage mais je trouve toujours l’apport de l’interactivité beaucoup trop superficiel.

C’est là qu’intervient l’événement de la semaine: le prototype de Return of the Obra Dinn de Lucas Pope. Un garçon dopé au talent à qui l’on doit le retentissant Paper Please et le discret mais non moins excellent Helsing’s Fire. Monsieur Pope m’a redonné foi en la narration interactiveen 20 minutes de jeu. Il se cache bien derrière cette étrange discipline à mi-chemin entre le jeu et la narration classique un potentiel large et non exploré. Je ne peux qu’encourager tout un chacun à prendre 20 minutes pour lancer Obra Dinn et toucher des doigts toutes les promesses du genre. Lucas Pope réalise ici l’idée initiale de Gone Home, un lieu théâtre d’événements dont le joueur devra démêler l’histoire. A lui de faire les liens, d’enquêter, de fouiller, de déduire, de se tromper, d’échouer, bref de jouer de l’interactivité à plein.obra

Espérons seulement que maître Pope ne sera pas effrayé comme d’autres avant lui par le Spectateur, ce despote accoutumé à la narration linéaire dont l’envie est le plus souvent inversement proportionnelle à l’investissement demandé. Car c’est bien lui, avec sa flemmardise navrante qui maintient l’entier du genre à l’orée de son potentiel. Ce Spectateur constitue malheureusement la majorité prête à mettre la main au porte-monnaie. Venu de la télévision, au retour du boulot il désire uniquement vider sa tête devant un « jeu » lui donnant l’illusion d’interactivité tout en exigeant aussi peu de lui que possible. Bien heureusement, le joueur moyen de Papers Please semble être sensiblement plus éveillé au plaisir et à l’exigence du jeu, ce qui devrait permettre à Lucas Pope, contrairement à The Full Bright Company (Gone Home), de pousser son raisonnement de la narration interactive jusqu’au bout.

Comme dirait l’autre: wait and sea mon capitaine…