Diablo 3

Cher Diablo 3,

Comme tant d’autres je t’ai attendu sans fin. Loué à la lumière de tes ancêtres. Nous allions danser des années entières sous des lunes infinies. Tu allais me rendre beau, fort et surtout intelligent.

Aujourd’hui, je te hais.

Au début pourtant, tout allait pour le mieux. Tu étais comme annoncé: très beau, élégant même, avec ton faux air de ténébreux. Gameplay nerveux, monde vaste, j’étais aux anges. J’ai commencé à me douter qu’il se tramait quelque chose lorsque le «je» est devenu «nous». Mes amis et moi-même explorions tes donjons en baillant, notre cerveau laissé sur la touche par des ennemis amorphes.

Tes modes de difficulté inférieurs traversés dans l’ennui, les choses se corsaient. Un semblant d’organisation devenait nécessaire. Nous nous mîmes à mourir un peu, puis un peu plus et rapidement beaucoup trop. Visiblement, il nous manquait des armes à la hauteur de cette difficulté. Nous les avons alors cherchées. Des heures durant. Nos méninges à nouveau dans notre poche. Mais tu ne lâchais rien, ou plutôt si: plein de haches pour magicien, de bâtons pour guerrier ou d’arcs pour féticheur.

Naïfs, nous nous remîmes en question: nous avions forcement loupé quelque chose. Nous découvrîmes la boîte de pandore dans un lieu inattendu. Un endroit qui selon tes paroles ne devait rien changer. L’hôtel des ventes ou HV, comme tu aimes l’appeller affectueusement, a tout changé. Nos armes étaient là, par milliers, vendues par d’autres joueurs plus chanceux. Là où autrefois nous devions faire preuve de talent pour nous équiper, nous récoltions aujourd’hui des pièces d’or dans l’ennui, pour acheter nos armes à d’autres.

Ayant transformé notre jeu d’autrefois en travail, tu t’es alors vite rendu compte que travailler à la fois en vrai et virtuellement pouvait être redondant. Tu nous as donc laissé la possibilité d’utiliser l’argent gagné le jour pour acheter les armes permettant de nous amuser la nuit. Quelle joie, tu avais inventé le free to pay: nous avions payé pour t’avoir et nous payons à nouveau pour jouer.

Aujourd’hui comme tu le sais, je suis parti vers d’autres horizons, moins beaux mais plus sincères. Quand à ceux qui sont restés parce qu’à défaut d’être généreux, tu es beau et nerveux, je leur ris au nez. Je préfère partager mon temps avec un laideron respectueux que de me faire enculer par un beau gosse méprisant. Question d’honneur.

Bien à toi,

Sandro

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