Zelda: A Link Between Worlds

Tout les domaines ont connu de grand rivaux. Des personnalités si différentes que leur présence simultanée tourne invariablement au vinaigre. Si la boxe a connu Mohammed Ali et Foreman, la musique Nirvana et les Gun’s, le dessin animés l’inspecteur Gadget et le Docteur Gang, les jeux-vidéo à tendance aventuresque ont Monsieur Liberté et Monsieur Structure.

Monsieur Liberté, bien connu de l’amicale de Skyrim, est le branché des deux. Petites lunettes fashion, jeans slim et baskets tendance, il s’installe nonchalamment au début du de l’aventure pour ensuite fumer clope sur clope, en regardant son joueur évoluer comme bon lui semble. « Fais tes expériences mon enfant, amuse-toi, découvre le vaste monde! » semble-t’il suggérer de son air détaché. Le joueur est grisé par son indépendance, par tous les choix qui sont mis au creux de ses petites mains dodues. Seulement, cette souplesse se traîne une lourde contrepartie: Il lui est impossible d’insuffler du rythme haletant ou de belles énigmes évolutives forgées avec amour. Car Monsieur Liberté ne connaît pas grand chose de son hôte. A quelle heure ce dernier se rendra sur la montagne du Dragon Noir? Avec quel équipement? Que transporte-il dans ses poches? Il n’en sait fichtrement rien. Pire: il s’en fout.

A l’inverse, Monsieur Structure est le vieux professeur. Celui à l’oeuvre dans la série Zelda depuis « A Link To The Past ». Il a de vieux patchs élimés sur les coudes et des pantalons en velours côtelé. Il poursuit le joueur en permanence: fais pas ci, fais pas ça, vas ici, vas par là! Impossible de faire quoi que ce soit sans l’avoir sur le dos. Il est pénible, mais il a ses raisons: il souhaite proposer à son hôte une série d’énigmes à la difficulté croissante et à la complexité flatteuse. Puisque il sait précisément avec quelles armes et quel nombre de coeurs le joueur va venir attaquer le Dragon Noir ou quels objets seront disponibles pour le donjon de Glace, il peut adapter ses challenges pour proposer une évolution douce et finement calibrée.

Pas la peine de dire que chaque tentative de réunion de ces deux-là au sein d’un même jeu s’est soldé par un échec. On se souvient encore de Darksiders 2 qui après un premier épisode sympathique avec le vieux professeur Structure avait accouché d’un deuxième épisode apathique en s’acoquinant avec le hipster Liberté. Comme le dit l’adage: « N’est pas Nintendo qui veut ».

Dans « Zelda: A Link Between Worlds », Link se met littéralement à plat pour faire fonctionner ces deux larrons de concert. En effet, le monde d’Hyrule est aujourd’hui régi par Monsieur Liberté. Les objets si chers à la série se louent chez un marchand et sont rapidement tous accessibles. Plus rien ne conditionne le joueur à accéder aux donjons dans un ordre préétabli. LIBERTE!
Pourtant, chaque donjon garde son lien sans faille avec Monsieur Structure. On n’accède pas à un donjon sans avoir au préalable résolu une énigme impliquant son objet star. Manière élégante de s’assurer que le joueur ne se lance pas dans une quête impossible. STRUCTURE!

Des donjons linéaires et un monde sans rythme. La belle affaire! Ce n’est pas en leur donnant chacun des quartiers séparés qu’on va éviter leurs tares: ils n’ont rien résolu chez Nintendo ! Oui sauf que comme dit plus haut, Link se met à plat. Littéralement.

Comme on commence à le savoir, dans cet épisode Link peut se coller aux murs, façon dessin 2D. De cette idée simple découle un nombre de possibilités absolument affolant. Mieux, ces possibilités nouvelles sont complètement indépendantes de toute évolution du personnage ou des objets. Voilà le moyen rêvé d’établir un terrain d’entente entre Liberté et Structure. Le Hispter Liberté est bien content de faire appel à Link 2D pour donner du rythme à son univers avec des énigmes à la complexité flatteuse: STRUCTURE!
Professeur Structure est lui enchanté de faire appel à ce dernier pour permettre l’accès à des lieux et trésors annexes au sein de ses donjons: LIBERTE!

Il n’en faut pas plus pour que dans ce Zelda, tour de force absolu, ces deux ennemis légendaires semblent dialoguer: « – Vous prendrez bien un peu de choix, mon bon Monsieur Structure? » « – Oh, mais je vous en prie cher Monsieur Liberté, pas de ça entre nous : servez-vous donc de mes énigmes ».

Après tout, n’est-ce pas le minimum que l’on peut attendre d’un jeu qui se titre : « A Link Between Worlds » ?

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